• La composition Héraldique

    LA COMPOSITION HÉRALDIQUE

    Le blason par son origine guerrière d’identification est un système de signes construit selon des contingences de lisibilité dont les couleurs franches et la stylisation des figures sont les principaux atouts. Ses règles efficaces lui ont fait passer les âges et inspirent encore l’emblématique moderne (drapeaux nationaux, signalisation routière, sigles). Elles sont à la fois souples et rigoureuses et se développent autour de deux éléments, les couleurs et les figures s’inscrivant dans un périmètre dénommé " écu ". Hormis la règle d’alternance des émaux, la composition des armoiries obéit plus à des usages et des conventions qu’à des règles proprement dites. La forme triangulaire de l’écu la volonté de symétrie, de clarté et une certaine aversion du vide en particulier dans les armoiries médiévales apportèrent une mise en page coutumière des pièces héraldiques en fonction de leur nature et de leur nombre. Si la place des pièces honorables et des partitions résultant de la division géométrique du champ de l’écu reste par nature fixe les meubles pour leur part possèdent plusieurs dispositions coutumières. Un meuble seul se place au centre de l’écu dans son attitude usuelle (par exemple, à la verticale pour le lion qualifié de rampant et à l’horizontale pour le léopard qualifié de passant) et occupe la plus grande surface possible. La volonté de remplir l’espace de l’écu même avec une seule figure est une préoccupation constante de la période médiévale. C’est seulement à partir du milieu du XVIe qu’apparaît la mode des meubles mignardés perdus dans le champ de l’écu. Deux mêmes meubles se posent selon leur attitude propre ou leur forme soit, l’un à côté de l’autre (deux lions ou deux bars pouvant être affrontés ou adossés) soit l’un au-dessous de l’autre (deux léopard ou deux loups posés l’un sur l’autre ou posé en pal). Trois mêmes meuble épouseront le plus fréquemment la surface triangulaire de l’écu en se posant 2 et 1, deux en chef et un en pointe et quelques fois se poseront soit côte à côte soit l’un au-dessous de l’autre en fonction de leur attitude d’usage ou de leur forme (trois léopards à la posture horizontale seront l’un au-dessus de l’autre alors que trois fusées de forme allongée seront côte à côte). Quatre ou cinq mêmes meubles s’inscrivent dans un carré en se posant 2 et 2 pour quatre meubles et 2, 1 et 2 pour cinq meubles. Six mêmes meubles se posent 3, 2 et 1 épousant pleinement la surface de l’écu à l’exemple de la position 2 et 1 pour trois mêmes meubles. Plus de six meubles identiques se posent à la périphérie de l’écu constituant une bordure figurée du champ laissant son milieu vide. Lorsque le nombre de meubles identiques dépasse les douze ceux-ci couvrent entièrement le champ de l’écu à la façon d’une étoffe chamarrée. On parle alors de semé. Il est à noter que la structure et le répertoire décoratif des étoffes ont fortement marqué les armoiries primitives. Nombre de termes du blason sont empruntés au langage du textile et des pièces héraldiques comme le diapré, le plumeté ancien, le papelonné augmenté de petites figures et les semés trouve vraisemblablement leur inspiration dans les étoffes sophistiquées de l’orient déjà prisées dans l’Europe médiévale.

    La composition Héraldique

    D’une façon générale, les armoiries primitives sont constituées d’un meuble principal, de plusieurs meubles identiques, d’une pièce honorable, d’une partition simple ou rebattue, par essence bicolores elles respectent de façon stricte la règle d’alternance des émaux. Si le champ des armoiries est d’une couleur, les pièces héraldiques les composant seront de métal, si le champ est de métal les pièces seront de couleur. Au XIIIe siècle de façon moindre et plus sûrement au XIVe siècle, alors que le rôle militaire des armoiries s’amoindrit et que se développent les armoiries sigillaires des non combattants, des associations entre meubles et pièces géométriques, meubles différents ou, entre partitions et pièces honorables s’organisent multipliant les possibilités d’armoiries. La première de ces associations réunit sur le champ de l’écu une pièce honorable et des meubles identiques, une fasce ou un chevron (en France, ce dernier prit le pas sur la fasce en termes de fréquence) avec trois meubles deux posés en chef et un en pointe. Le pal, la bande et la barre s’accompagnent de deux meubles posés de part et d’autre de ces pièces. Lorsque le nombre des meubles associés à la pièce est supérieur à trois les meubles se posent généralement en bordure. La croix et le sautoir scindant le champ de l’écu en quatre quartiers s’associent naturellement avec quatre meubles. Si les armoiries utilisant ces associations sont parfois de trois émaux cela ne dérange pas la règle d’alternance des émaux. Si le champ est d’une couleur la pièce et les meubles seront d’un même métal ou de deux métaux un pour la pièce et un autre pour les meubles. Pareillement, si le champ est de métal la pièce et les meubles pourront être d’une même couleur ou de deux couleurs différentes.

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    Dans la seconde moitié du XIIIe siècle en plus d’être accompagnées de meubles, les pièces sont utilisées à l’instar du champ de l’écu comme surface armoriale. La fasce et le chef furent chargés assez tôt de trois meubles identiques. Si la fasce, la bande, la barre la croix et le sautoir peuvent être associés à des meubles à la fois par accompagnement et par le chargement de leur surface le chef, la bordure et le franc-quartier ne peuvent être associés à des meubles que par chargement. Les armoiries aux pièces chargées de meubles appliquent la règle d’alternance sur deux plans le premier étant le champ de l’écu et le deuxième plan étant constitué par le champ de la pièce honorable. Si les pièces accompagnées et/ou chargées de meubles sont les associations les plus fréquentes il existe bien d’autres types d’associations dans les armoiries médiévales. Les pièces chargées d’une partition ou d’une autre pièce, un meuble chargé d’une pièce ou d’une partition, une pièce ou une partition sur les quelques se pose en plein un meuble ou encore un meuble chargé d’un autre meuble et plus rarement une partition posée sur une autre partition. Dans le cas des associations avec une partition, la règle d’alternance des émaux ne peut être entièrement respecté, les partitions déjà constituées d’un métal et d’une couleur oblige l’élément associé, champ de l’écu, pièce ou meuble à un contact en certain endroit entre émaux de même nature. Les figures ainsi posées sur une surface bicolore ou déjà armoriée sont qualifiées de brochant. Il est cependant possible de respecter la règle d’alternance des émaux pour ces armoiries à superposition en changeant l’émail de la figure à l’instant où elle se place sur le second émail de la partition, à l’instar d’un négatif photographique. Ce système, appelé de l’un en l’autre, bien que peu utilisé produit des armoiries intéressantes par la complexité de leur dessin totalement abstrait pour certaines.

    Au XIIIe siècle les meubles des armoiries qu’ils se trouvent seuls à occuper le champ de l’écu ou qu’ils accompagnent ou chargent une pièce honorable sont le plus souvent identiques. C’est au XIVe siècle que l’usage de meubles différents dans les armoiries devient fréquent. Dans un premier temps ce sont des animaux tenant un objet ou bien deux sortes de meubles une première accompagnant une pièce alors que la seconde le charge. Assez tôt d’autres associations apparaissent, deux animaux d’espèce différente, deux objets de nature différente, un animal et un personnage ou encore plusieurs personnages. Cette multiplicité des sujets à l’intérieur de mêmes armoiries produisirent au XVIIe siècle des tableaux allégoriques en totale contradiction avec l’esprit de clarté et de lisibilité du blason médiéval.

    L’usage multiple des armoiries comme emblème personnel, familial et territorial ont muni assez tôt certaines personnes de plusieurs armoiries soit par alliance soit par la possession de plusieurs fiefs armoriés. Ces armoiries furent dans un premier temps associées dans des écus juxtaposés en particulier sur les monuments sculptés ou dans les manuscrits alors que sur les sceaux équestres le bouclier du chevalier, la housse de son cheval, sa bannière permettaient d’exprimer au moins trois armoiries différentes. L’usage suivi de porter plusieurs armoiries amena peu à peu à la combinaison de ces armoiries dans un seul et même écu. Les armoiries étaient coupées dans leur hauteur pour ensuite être réunies dans écu parti les premières en parti dextre (situé du point de vue du spectateur à gauche) et les secondes en parti sénestre (situé du point de vue du spectateur à droite). Cette façon de faire produisant des armoiries à figures hybrides curieuses comme un mi-aigle mi-lion ou des mi-léopards mi-barques présentait l’inconvénient de mutiler les armoiries ou de trop déformer le dessin des meubles lorsque celui-ci était adapté au format allongé du parti. Elle fut assez tôt supplantée par l’usage de l’écartelé, la surface de ces quartiers permettant d’exprimer les armoiries dans leur intégralité en conservant les proportions des meubles. Les armoiries écartelées aux quartiers armoriés sont attestées au XIIIe en Espagne elle ne deviennent néanmoins courantes dans l’ensemble des pays héraldiques qu’au XVe siècle. Dans un premier temps, l’écartelé associait deux armoiries, les quartiers 1 et 4 recevant les armoiries les plus importantes ou celles comportant une pièce honorable, alors que les quartiers de 2 et 3 recevaient les armoiries restantes. Devant la multiplicité des armoiries, les écartelés associèrent rapidement autant d’armoiries que de quartiers la surface de l’écu pouvant être coupé et parti d’un plus ou grand nombre de traits les capacités de l’écartelé qui n’était que de quatre quartiers furent augmentés. Des écus à six, huit, dix ou douze quartiers armoriés sont utilisés voire à seize ou trente-deux jusqu'à soixante-quatre ou cent vingt-huit quartiers, compositions contemporaines extrêmes illustrant les unions armoriées d’une famille sur des siècles.
    Pour associer plusieurs armoiries l’écartelé et les partitions dont l’usage va grandissant tout au long du XVe siècle ne représenta pas le seul moyen employé. Du XIIIe au XIVe siècle certaines pièces honorables comme le franc-quartier, le chef, l’écusson posé au cœur de l’écu ou plus rarement la bande et la bordure ont été utilisées comme surface armoriale. Alors que l’écu recevait les armoiries principales, les pièces sont chargées des armoiries secondaires. Cette application ne pouvant associer que deux armoiries fut peu à peu abandonné dès lors que l’usage des écus écartelés se développa.

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